Suicide chez les agriculteurs: mieux vaut prévenir!

Suicide chez les agriculteurs: mieux vaut prévenir!
Les facteurs de stress seraient plus nombreux chez le agriculteurs que pour le reste de la population. (Photo : depositphotos)

C’est parmi les agriculteurs que l’on dénombre le plus haut taux de suicide par 100 000 habitants et toute profession confondue. Un constat qui force le Centre d’écoute et de prévention suicide du Centre-du-Québec à grossir les équipes de sentinelles dans les municipalités agricoles de la MRC de Drummondville.

Ces données surprenantes n’étonnent guère ceux qui oeuvrent dans ce secteur d’activité ou côtoient régulièrement des agriculteurs, comme Philippe Roy, qui enseigne le travail social à l’UQAC après avoir mené une thèse doctorale sur la masculinité et l’adaptation au stress des agriculteurs.

Selon lui, la moitié des 40 000 agriculteurs québécois vivent un niveau de stress important. Autour de 50% des agriculteurs masculins vivent de la détresse psychologique, une tendance qui s’élève à 60% chez les agricultrices.

«On reconnaît que les cas de détresse sont moins déclarés et sous diagnostiqués chez les hommes, ce qui peut laisser penser qu’ils le sont également chez les agricultrices», avance prudemment M. Roy, qui attribue cela à la mentalité conservatrice du milieu agricole.

C’est que les facteurs de stress sont nombreux : variations climatiques, entreprise tributaire du marché et donc à risque de perte de revenus, difficultés à concilier travail et famille, horaire exigeant, une liste à laquelle s’ajoutent les conflits conjugaux, une vie sociale souvent restreinte et l’isolement.

M. Roy estime qu’il y a une revalorisation du travail d’agriculteur à faire de la part du gouvernement, mais aussi entre agriculteurs, entre citoyens. «Ces gens travaillent sept jours sur sept et ils sont peu valorisés. Il faut renforcer le tissu social entre agriculteurs. Il faut aussi des politiques gouvernementales leur étant favorables», signale-t-il.

Celui-ci considère comme une belle avancée l’implantation de travailleurs de rang qui s’en vont voir directement les agriculteurs dans leur milieu de travail et qui leur parleront tandis qu’ils vaquent à leurs tâches.

Sandrine Vanhoutte, la directrice du CEPS du Centre-du-Québec, salue elle aussi ce nouveau service à la disposition des agriculteurs. «On applaudit l’idée. Même que l’on trouve qu’il n’y en a pas assez», soutient-elle.

Plus de sentinelles

Le CEPS du Centre-du-Québec a toutefois été mandaté par le CIUSSS de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec pour prendre en charge la formation de sentinelles. Le CIUSSS-MCQ est d’ailleurs le seul centre intégré universitaire de santé et de services sociaux à soutenir cette formation au Québec, souligne Sandrine Vanhoutte, la directrice du CEPS du Centre-du-Québec.

Mercredi dernier, Sandrine Vanhoutte est allée rencontrer l’Union des producteurs agricoles pour obtenir leur appui dans sa présente démarche de soutien de la classe agricole. Celle-ci veut former des réseaux d’au moins six sentinelles d’ici trois ans dans chacune des 15 municipalités agricoles de la région. Drummondville dispose d’une trentaine de sentinelles à l’heure actuelle.

Les personnes visées pour grossir l’équipe de sentinelles peuvent être vétérinaires, banquiers, épiciers, membres du Cercle des fermières, bref toute personne côtoyant régulièrement des agriculteurs. On les outillera pour qu’ils soient en mesure de détecter le moindre signe de détresse, de découragement sérieux, parmi les producteurs agricoles. «Un peu comme des secouristes», fait remarquer Mme Vanhoutte.

Durant la semaine qui vient, des personnes-clés seront formées sur le territoire de la MRC de Drummondville. Une formation d’une journée. «Dans les centres de prévention suicide, nous sommes à l’affut de ces personnes vulnérables. Les stress qu’ils vivent sont loin de ceux vécus en ville», insiste Mme Vanhoutte.

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