JUSTICE. Le chauffard William Gamelin, 24 ans, de Pierreville, devra passer les 53 prochains mois derrière les barreaux pour avoir causé la mort de Marco Boisvert sur l’autoroute 20 alors qu’il était intoxiqué par l’alcool, le 6 juillet 2016. Il devra également s’abstenir de conduire pour une période de 10 ans.
La sentence a été rendue vendredi au palais de justice de Drummondville, en présence de la famille de la victime et de celle de l’accusé.
Dans la soirée du 5 juillet 2016, William Gamelin s’est présenté seul au bar de danseuses le Madona, à Saint-Germain-de-Grantham, afin de prendre des consommations. Vers 2h du matin, l’homme dans la vingtaine a tenté de quitter même s’il avait bu une importante quantité d’alcool. «Les caméras de sécurité ont permis de constater que l’agent de sécurité du bar a essayé pendant plusieurs minutes de dissuader l’accusé de prendre son véhicule», a affirmé la procureure de la Couronne, Me Smith.
Une tentative qui est restée vaine, puisque William Gamelin s’est éclipsé pendant que le portier appelait une compagnie de raccompagnement et a tout de même pris le volant pour se rendre sur l’autoroute 20 en direction de Québec. Un témoin a rapporté aux policiers avoir vu le véhicule de l’accusé rouler approximativement à 180 km/h avec les phares éteints.
L’accident s’est produit à la hauteur de Saint-Cyrille-de-Wendover. «La victime a été percutée de plein fouet par l’arrière et traîné sur une trentaine de mètres par la voiture de l’accusé», a rappelé Me Smith. De profondes respirations de la part de la famille de la victime ont suivi ces mots.
À l’arrivée des policiers, l’accusé semblait confus, à un point tel qu’il a demandé un raccompagnement jusque chez lui aux agents. Il a omis d’apporter son aide à la victime.
Les analyses ont permis d’évaluer l’alcoolémie de William Gamelin entre 159 et 210 mg d’alcool par 100 ml de sang au moment de l’impact.
«Des conséquences épouvantables»
Marco Boisvert avait 51 ans au moment de l’accident et rentrait chez lui en moto après son quart de travail chez Girardin.
Sa conjointe, Lyne Martel, a tenu à s’adresser au tribunal dans un vibrant message. «Je vous présente Marco», a-t-elle commencé, très émotive, en montrant une photo d’un homme souriant. «Je me suis effondrée en apprenant qu’il était décédé pendant la nuit. Depuis, je demeure craintive lorsque mes enfants ou des personnes que j’aime doivent prendre le volant. Se retrouveront-ils au mauvais endroit au mauvais moment, comme Marco l’a été?», a-t-elle exprimé avec des trémolos dans la voix.
Elle a reproché au chauffard de lui avoir enlevé l’amour de sa vie.
Elle raconte également que son conjoint préférait prendre l’autoroute 20 lorsqu’il devait rentrer chez lui la nuit, puisqu’il considérait que cette route était plus sécuritaire que la 122. La dame s’implique désormais dans la lutte contre la conduite avec les facultés affaiblies.
William Gamelin a regardé devant lui tout le long du témoignage d’un air impassible.
L’avocat de la défense, Me Lupien, s’est exprimé au nom de son client après le témoignage de la dame. «On ne peut pas revenir en arrière, mais je sais à quel point mon client aimerait que ce soit possible. La seule chose qu’il pouvait faire dans les circonstances, c’est d’enregistrer un plaidoyer de culpabilité. Il éprouve de sincères regrets, et revit cet événement chaque jour. C’est une faible consolation, mais il a la ferme intention de ne prendre aucune consommation d’alcool pour le reste de sa vie.»
Une peine considérée sévère
La peine résulte d’une suggestion commune entre la poursuite et la défense et tient compte de tous les facteurs aggravants et atténuants. «Un facteur atténuant est le fait qu’il ait plaidé coupable rapidement, six mois seulement après l’incident. Toutefois, les antécédents judiciaires, le taux élevé, la vitesse, la conduite dangereuse, la témérité et l’insouciance manifestée par l’accusé le soir de l’événement, la dissuasion de l’agent du bar et le délit de fuite sont considérés comme aggravants», a énuméré Me Smith. Elle ajoute que William Gamelin avait également un autre dossier en cours en matière de possession de stupéfiants au moment des événements.
Rappelons qu’au moment de son enquête sur remise en liberté, en août 2016, William Gamelin avait manifesté le désir d’aller en thérapie : une demande qui a été refusée par le juge Conrad Chapdelaine. Ce dernier avait statué qu’une telle requête s’apparentait davantage à un sauf-conduit. Le jeune homme de 24 ans vit avec des problèmes de toxicomanie depuis six ans, mais c’était la première fois qu’il manifestait l’envie d’aller en thérapie.
Ce n’est pas la première fois que William Gamelin se retrouve devant les tribunaux pour des délits semblables : en 2011, alors qu’il n’avait que 18 ans, il avait déjà été arrêté pour conduite avec les facultés affaiblies. «On vous a déjà fait confiance. De vous revoir aujourd’hui avec les conséquences épouvantables que nous avons pu constater, cela m’interpelle, comme juge et comme membre de ma communauté», a énoncé la juge Marie-Josée Ménard en regardant l’accusé.
«La peine que j’imposerai ne compensera jamais la peine éprouvée par la famille. Si c’était vous qui aviez perdu un père, un frère, une sœur, une conjointe, vous souhaiteriez que la sentence soit extrêmement sévère, a exposé la juge Marie-Josée Ménard en regardant l’accusé droit dans les yeux. Il faut comprendre. À 24 ans, c’est un lourd fardeau que vous aurez à porter.»