DRUMMONDVILLE. (NDLR: le maire de Drummondville Alexandre Cusson, qui est également préfet de la MRC de Drummond, président du CLD de Drummond (Société de développement économique de Drummondville) et vice-président de la Conférence régionale des élus du Centre-du-Québec, a fait parvenir aux médias une lettre ouverte dans laquelle il appuie l’abolition des CRÉ et des CLD. Le journal L’Express reproduit ici cette lettre de façon intégrale.)
Depuis quelques semaines, un débat se tient autour des intentions du gouvernement du Québec d’imposer des coupures importantes aux gouvernements de proximité que constituent les municipalités. Sa volonté est notamment d’abolir les Conférences régionales des élus (CRÉ) ainsi que les Centres locaux de développement (CLD).
Ces structures ne sont pas vitales au développement régional. Lorsque le réseau des CRÉ affirment que «le gouvernement refile aux municipalités et aux MRC l’odieux de couper dans le développement des régions», il fait fausse route. De son côté, quand l’Association des CLD titre que le «couperet tombe sur l’autonomie économique des régions», c’est tout aussi faux. Ce sont là des déclarations présomptueuses qui ne reflètent ni la réalité ni l’ambition que les municipalités ont pour leur développement.
Je suis profondément convaincu que l’avenir de nos régions et leur essor économique ne passent pas par des structures, mais plutôt par la capacité des élus de prendre les décisions nécessaires et d’en assumer l’imputabilité devant la population. Au bout du compte, c’est elle qui aura le dernier mot et qui portera un jugement sur les actions posées par ses représentants. Et si l’abolition de certaines structures permettait justement de rapprocher les citoyens des lieux décisionnels lorsqu’il est question de développement?
Il m’apparaît clair que les MRC sont pleinement en mesure d’assumer les responsabilités qui étaient dévolues aux CRE. Comme nouveau maire, je me suis souvent questionné au cours de la dernière année sur la pertinence de maintenir autant de paliers au sein desquels ce sont souvent les mêmes personnes qui se retrouvent, entraînant ainsi de nombreuses heures de réunions. La concertation régionale demeure cependant cruciale et, à cet égard, le rôle des tables des préfets des MRC d’une région sera primordial.
En ce qui a trait à l’abolition des CLD, je considère que le gouvernement du Québec doit être prudent dans l’application de mesures «mur à mur». Reconnaître le palier municipal comme un véritable partenaire, c’est aussi le laisser libre de ses choix. À cet égard, les élus locaux sont en mesure de juger eux-mêmes de la structure qui favorisera chez eux un développement économique efficace et créateur de richesse.
Drummondville : un cas d’exception
À ce titre, il faut souligner le cas d’exception que représente la situation de la Société de développement économique de Drummondville (SDED), un des organismes les plus efficaces de la province et dont les performances sont souvent citées en exemple au Québec et ailleurs dans le monde. Créée en 1986, bien avant les CLD, la SDED est à l’origine de l’impulsion remarquable qu’a connue le développement économique dans la MRC de Drummond. En 1998, la SDED acceptait d’intégrer la mission des CLD à sa charte.
Comme notre organisme existait bien avant les CLD, le gouvernement ne peut pas en dicter l’avenir. D’autant plus qu’il contribue à peine à 7 % du budget total présentement, ce qui représentera moins de 5 % après les coupures. Avec une participation aussi mince, Québec ne décidera certainement pas ce qu’il doit advenir de l’outil de développement que notre milieu s’est donné.
Nous comprenons que le gouvernement du Québec doive prendre des décisions difficiles pour redresser les finances publiques, et sommes prêts à vivre avec une coupure importante, mais nous n’acceptons pas et n’accepterons jamais qu’il compromette le succès économique de notre région et, ainsi, la qualité de vie de nos commettants.
Avec ou sans les CLD et les CRÉ, Drummondville demeurera un des plus importants moteurs économiques du pays et une pépinière d’entrepreneurs. Le gouvernement de proximité qu’est la municipalité et le lieu de concertation supralocal qu’est la MRC sauront assumer le leadership nécessaire pour poursuivre sur notre lancée exceptionnelle et participeront activement à faire entendre la voix de la région auprès du gouvernement du Québec.
Une nouvelle ère doit s’amorcer
Dans le Livre blanc présenté par l’Union des municipalités du Québec, les mairesses et les maires réclament une plus grande autonomie et une reconnaissance accrue du palier municipal. D’ailleurs, j’appuie pleinement l’UMQ et je suis solidaire de sa présidente et son équipe dans la négociation du nouveau pacte avec Québec.
Nous ne voulons plus être considérés comme une administration relevant du gouvernement du Québec, ce que nous ne sommes pas, mais comme un partenaire à part égale, puisque les municipalités ne sont pas redevables au gouvernement, mais bien à leur population locale.
La signature d’un nouveau pacte fiscal devra donc constituer un premier pas qui mettra en œuvre nos propositions légitimes. Une nouvelle ère doit s’amorcer ; l’heure est maintenant venue où les municipalités doivent assumer pleinement leur développement, en bénéficiant des ressources qui leur reviennent.
Comme maire de Drummondville, ce qui compte pour moi, ce n’est pas les structures, mais les résultats. Si la réforme que nous propose le gouvernement du Québec en abolissant les CRÉ et les CLD ne vise qu’à économiser de l’argent sur le dos des régions, le ministre des Affaires municipales me trouvera sur son chemin pour lui barrer la route. Par contre, s’il démontre qu’au cœur de sa restructuration se trouve l’importance de rapprocher les ressources des citoyens pour en maximiser les retombées, dans le respect de nos compétences respectives, je serai un partenaire qui l’appuiera.
Alexandre Cusson