DRUMMONDVILLE. Ce fut au tour de Patrick Naud de témoigner, ce matin, au procès suivant la mort de sa défunte épouse, Chantal Lavigne. Si l’homme refusait de prendre une pause durant ses moments d’émotion, comme le Tribunal le suggérait, c’est qu’il était vraiment déterminé à venir à bout de cet interrogatoire.
En couple avec Chantal Lavigne depuis 1999, Patrick Nault a habité quelques années avec elle à Longueuil. Le 7 février 2004, les deux tourtereaux ont uni leurs destinées par les liens du mariage. "J’étais son mari, son conjoint, son âme sœur", a-t-il illustré.
Dans les mois qui ont suivi, leur premier enfant, Anaëlle, voyait le jour. "Chantal était une mère exemplaire", a exprimé le père de famille, spécifiant qu’elle donnait beaucoup de temps à leur fille.
Durant les premières années de vie commune, Mme Lavigne occupait un, parfois deux emplois, soit comme adjointe administrative ou téléphoniste. Son amoureux, quant à lui, travaillait comme camionneur.
Vers 2007, les économies de la petite famille lui ont permis de faire l’acquisition d’une maison à Saint-Albert, au Centre-du-Québec. Pour eux, la campagne respirait la santé. Un mode de vie qu’ils voulaient offrir à leurs enfants. D’ailleurs, il a fallu attendre le 26 juin 2009 pour qu’un petit garçon, au nom de Loïc, joigne à son tour la famille.
Toujours plus de formations
À l’époque, Patrick Naud avait connaissance que sa conjointe suivait à l’occasion des cours de "croissance personnelle". Il la respectait, même s’il ne partageait pas du tout cet intérêt. "On avait chacun nos passions", a expliqué ce fervent amateur de médiéval.
Au dire de ce dernier, la situation se serait gâtée lorsque sa femme a fait la rencontre de Gabrielle Fréchette, le 10 octobre 2007. "Elle était mordue", s’exclame-t-il. Au terme de son congé de maternité, sa conjointe a pris une année sabbatique de son emploi de commis de bureau au Cégep de Victoriaville pour s’investir dans une formation de trois ans qui devait lui permettre d’aider les gens.
Toutefois, l’intensité du programme la forçait à s’absenter régulièrement du nid familial et à négliger ses responsabilités parentales. "Il y a eu un laisser-aller familial total", a-t-il exposé au Tribunal.
Les calendriers de la famille ont d’ailleurs été présentés comme preuve, démontrant la fréquence des activités de formation en cause, qui étaient, semble-t-il, majoritairement offertes par Gabrielle Fréchette ou ses invités. "On est même allé jusqu’en Irlande", a lancé M. Naud.
Pendant une semaine, l’homme a accompagné sa conjointe, où il avait connu plusieurs membres du groupe qui allaient suivre la formation de Mme Fréchette, au cours des deux semaines suivantes.
Jamais il n’a voulu assister à l’une d’entre elles. Un autre séjour était aussi prévu en Afrique, a ajouté M. Naud, exaspéré.
À quel prix
Il faut dire que les multiples formations de Chantal Lavigne causaient des tensions dans le couple durant les derniers mois précédant son décès. "Chaque fois qu’elle partait, je n’aimais pas ça. Je créais une chicane, admet-il. On s’aimait énormément, mais à la fin, je n’étais plus capable. J’avais même osé lui dire que j’avais pensé au divorce", a-t-il exprimé à la juge Hélène Fabi.
En plus des absences, qui pouvaient durer des semaines, le père de famille contestait les coûts reliés à ces cours. Et quelle n’a pas été sa surprise de constater, après les événements du 29 juillet 2011, les comptes restés impayés malgré les sommes d’argent qu’il lui versait à cette fin. "C’est elle qui avait toujours tout géré", rapporte-t-il. Chantal Lavigne avaient laissé des cartes de crédit dans le rouge de 40 000 $.
Mais il y avait pire encore… cet endoctrinement a, selon lui, coûté la vie de sa femme et la mère de ses deux enfants, et ce, même si elle jouissait d’une santé enviable.
C’est donc un père de famille meurtri qui s’est excusé, au terme de son témoignage, à la juge Fabi, qui lui a pardonné ses hésitations. "Ça va… Ça a bien été", l’a-t-elle rassuré.