DRUMMONDVILLE. Le Village québécois d’antan n’est plus le même depuis vendredi soir. D’étranges créatures, psychopathes et tortionnaires ont envahi les lieux. Pourtant, quelques heures plus tôt, alors que le soleil éclairait encore les rues, tout semblait normal… ou presque.
Dans le sous-sol de l’auberge, tout un branle-bas de combat débutait. Avant que le soleil se couche et que les êtres de l’horreur n’aient qu’un but en tête – celui de faire peur – L’Express s’est rendu sur place pour en savoir davantage sur l’envers du décor.
Il est 16 h 30. Les comédiens et animateurs à arrivent dans le sous-sol de l’auberge, vague après vague, depuis une trentaine de minutes. Plusieurs employés d’été sont de retour pour le Village hanté. Ceux dont le maquillage est plus complexe et plus long à sécher – certains ont besoin de quelques couches de produits – sont les premiers à s’installer à la chaise de la maquilleuse professionnelle. Anne-Marie Noble transforme les comédiens un à un. Des jolis minois naissent des visages déstabilisants.
Les costumes, tous bien identifiés aux noms des comédiens, sont alignés sur les supports. Les masques et les perruques se trouvent un peu plus loin, sur des étagères. Sur les tables sont éparpillés le maquillage et les accessoires qui permettront aux animateurs de se transformer en d’horrifiants personnages.
Les costumes nécessitent quelques ajustements. Ils ont été conçus un peu plus grands, non pas pour les risques de gains de poids, mais plutôt pour permettre aux comédiens de porter des vêtements plus chauds en-dessous. Comme les épaisseurs augmentent alors que le mercure descend, la marge de manœuvre est parfois bien mince.
Deux rangées de radios émettrices (walkie-talkie) sont prêtes à être utilisées. La coordonnatrice du développement et des événements du Village québécois d’antan, Geneviève Legault, répond aux nombreuses questions et semble être capable de se multiplier pour être partout en même temps.
Michel Moore, l’un des habitués quatre saisons du VQA, s’apprête à faire sa tournée des lieux avant que la nuit tombe. Il connait les moindres racoins; c’est l’un de ceux qui ont participé au montage du Village hanté. Il invite L’Express à monter à bord de la voiturette de golf.
Premier arrêt : l’infirmerie. Une scène intense s’y déroule. La «victime» provient des États-Unis. Elle a été rencontrée au TransWorld’s Halloween & Attractions Show et attirée à Drummondville par les dirigeants du VQA, tombés en amour avec elle. Et il y a de quoi! Frissons garantis… même en plein jour. En sortant de la maison, M. Moore, grand blagueur, fait le décompte des représentants de L’Express pour voir si tous ont survécu. Bilan positif; la tournée se poursuit.
Dans la forêt, soit l’ancien sentier poétique, de petites lumières par paire deviennent des yeux de loup la nuit venue. Le soleil commence justement à baisser et M. Moore allume chaque lampe qui longe le chemin parsemé de racines. Une équipe de la sécurité s’apprête à y pénétrer.
Dans la chapelle, des animateurs apportent une dernière touche à leur maquillage et s’approprient les lieux. Dans l’école, la maîtresse et ses élèves s’apprêtent à s’appliquer un peu plus de sang. Ils profitent des derniers instants de tranquillité avant que la soirée commence.
Dans les rues, les flambeaux commencent à se faire allumer et d’étranges personnages sortent du sous-sol de l’auberge pour envahir le Village. Le brouillard se lève. Les machines à fumée fonctionnent à plein régime.
«C’était plus dur pendant les trois dernières semaines. Là c’est le plaisir qui commence», laisse tomber Daniel Langlois, un autre habitué du VQA qui se charge ce soir-là de la sécurité.
18 h. Alors que les premiers visiteurs entrent sur le site, les employés du Village voient à ce que tout soit en place. Les ondes des radios émettrices ne dérougissent pas. «Il manque un métronome ici.» «On a besoin d’une lumière ici.» «Est-ce qu’on entend la musique dans les rues?» Deux équipes font une toute dernière tournée des bâtiments avant d’en ouvrir les portes aux courageux.
Geneviève Legault manque déjà de voix, mais tout est sous contrôle pour ce début de soirée de rodage.
Puis la nuit tombe… et les cris s’intensifient. Pendant que les comédiens s’en donnent à cœur joie, les visiteurs sont sur leur garde, dents serrées et poings fermés; prêts à avoir la frousse.
Jusqu’au bout
Pour vivre pleinement l’envers du décor, la journaliste de L’Express, auteure de ces lignes, s’est glissé dans la peau d’un personnage au visage peu empathique. Située à l’arrière de la maison Courchesne-Cool, elle s’est cachée tantôt derrière une clôture, tantôt assise sur un coffre de bois pour tenter de surprendre les gens et de récolter les plus grandes réactions.
Sous le masque, la respiration est gênée et il fait chaud. Mais ces petits désagréments en valent la peine. Quelle fierté de voir une femme se cacher derrière son conjoint ou un petit groupe d’hommes sursauter tous ensemble!
Quelques semaines plus tôt…
L’aménagement du Village hanté a débuté au lendemain de la fin de la saison estivale du Village québécois d’antan. Plus de trois semaines de travail ont été nécessaires pour transformer le décor.
Pour être mieux outillés, les employés du VQA se sont rendus cette année au TransWorld’s Halloween & Attractions Show qui se déroulait aux États-Unis. Ils y ont notamment appris à mieux utiliser les accessoires et à faire peur davantage.
«Avant, on n’avait pas ce bagage-là, indique Geneviève Legault. L’an passé, les visiteurs voulaient avoir plus peur. C’est ce qu’on a eu comme commentaires. On s’est donc dit qu’ils auront plus peur. Les animateurs n’ont pas de mandat de faire peur à moitié.»
Tous les animateurs, comédiens et «contrôleurs de files» ont bénéficié de trois heures de formation. En plus d’une formation générale, ils en ont eu une spécifique à leur lieu, par petits groupes. Ils ont donc pu se familiariser avec l’endroit et prendre conscience du rôle, du concept, du costume et du masque. Tous ceux qui sont en poste dans la zone avertie ont aussi reçu une formation sur l’art de faire peur; comment se faufiler, à quel moment crier, comment éviter de perdre la voix après quelques heures, comment cibler les personnes d’un groupe, comment accueillir une foule, etc… (Bref, quelques notions qui manquaient à la journaliste de L’Express.)