OENOLOGIE. De quoi peuvent bien parler deux voisins qui découvrent que l’un s’amuse dans l’importation de vin et l’autre vient de suivre un cours de sommellerie? D’un éventuel vignoble bien sûr. Et c’est précisément ce qui s’est passé en 2008 dans un coin enchanteur d’Ulverton où Michel Dagenais et Brian Illick ont décidé de se lancer dans cet ambitieux projet de vignoble… à partir de rien!
Résultat, six ans plus tard, sur les terres ancestrales de la famille Wadleigh (1885), 16 000 plans sont sortis de terre sur une dizaine d’âcres pour offrir et commercialiser un vin blanc, un rosé, un vin de glace et deux rouges dont un plus corsé que l’autre. Ainsi sont nés les Vallons de Wadleigh, une entreprise artisanale devenue incontournable sur la liste des attraits agro-touristiques.
Après avoir fait construire la bâtisse où il a tenté l’expérience d’une bergerie, sur un terrain de 175 âcres, Michel Dagenais s’est intéressé au vin au point d’en faire quelques importations. Son voisin, Brian Illick, fort d’un cours de sommellerie au Manoir Trent, avait de quoi alimenter leurs conversations. De là leur passion commune.
«Au début, en rêvassant, on imaginait les vignes pousser tout seuls et on se voyait autour d’une petite table avec une nappe carottée rouge et blanc en dégustant notre vin paisiblement… mais ce n’est pas comme ça que ça s’est déroulé , raconte Michel Dagenais. Avec des cépages qui avaient la particularité de résister au froid et de mûrir rapidement, il a fallu y mettre des heures et des heures de travail pour, d’abord, débuter les plantations, et ensuite procéder à l’entretien via diverses opérations accaparantes. La taille, notamment, exige chaque printemps une vingtaine de coups de clipper pour chaque plan, je vous laisse multiplier par 16 000, et au bout du compte ça donne des maux de dos et des coups de soleil».
L’exercice manuel ne s’arrête pas là. Les deux vignerons ont dû préparer le palissage et le relevage pour tenir les vignes hors du sol, dans le but de maximiser l’ensoleillement et le mûrissement. Pas moins de 3000 gicleurs ont le rôle de créer une bruine visant à empêcher le gel printanier. «S’il arrive un gel, nous devons parfois passer la nuit debout pour sauver nos plans. C’est de l’amour ça».
Outre la fertilisation et la pose de filet servant à repousser les oiseaux, l’entretien comprend aussi la tonte, l’épamprage, l’effeuillage, l’écimage, tout ça pour favoriser la photosynthèse.
Pour surveiller le tout, un système informatique de météo affiche sur écran les statistiques concernant, entre autres, les degrés-jours accumulés, la quantité d’eau utilisée et la vélocité des vents.
Et nous voilà rendus aux vendanges, la récompense du vigneron.
«On fait des invitations, les gens viennent et, après une petite formation, ramassent les raisins qui sont déposés dans l’égrappoir (fouloir) avant de prendre la direction des cuves en aluminium où débute la fermentation qui durera une à deux semaines. Commence alors l’élaboration, soit l’étape cruciale où s’effectuent les tests pour le goût. Nous faisons appel à un œnologue, Jean-Paul Martin, qui, tel un cuisinier, vient vérifier sa sauce à chaque semaine. Après quoi, le vin est vieilli soit dans les barils de chêne, soit dans les cuves en acier inoxydable, durant une période variant de 18 à 24 mois», d’expliquer Brian Illick.
«Il faut, ajoute-t-il, que le vin soit à notre goût, Si ce n’est pas à notre goût, on ne le commercialise pas. Pour en arriver là, ça prend de la passion et de la patience». Comme le dit Michel Dagenais, «nous sommes des créateurs de saveurs».
La bâtisse intègre une salle de réception avec une fenestration exceptionnelle pouvant accueillir 70 personnes. Les Vallons de Wadleigh sont associés à La bonne vôtre, qui peut fournir un service de traiteur. À une centaine de mètres de l’édifice principal se trouve une petite maison qui a été rénovée afin de pouvoir y tenir des réunions ou des activités festives. Le domaine est également agrémenté d’un sentier de 2,5 kilomètres aboutissant à un terrain où ont été placées des tables à pique-nique en bordure de la rivière.
Les deux Ulvertoniens n’ont pas eu à emprunter pour réaliser leur projet, y investissant de leur propre argent, autour de 1,5 million de dollars. «Nous n’avons pas fait ça pour obtenir une rentabilité à court terme, nous voulions créer notre vin, un vin de qualité, et nous l’avons réussi», a fait valoir Brian Illick.
Les vins des Vallons de Wadleigh:
Vin blanc: fruité, avec une subtile saveur d’ananas et de litchi;
Vin rosé: plus sucré, léger goût de fraise, plus moelleux;
Vin rouge primeur, léger, légèrement fruité;
Vin rouge Réserve: vanillé, boisé, structuré.
Notez que le prix d’une bouteille est de 17 $, sauf le Réserve qui est à 22 $.