À juste titre, Drummondville est reconnue depuis quelques années comme une véritable plaque tournante du hockey mineur féminin au Québec. Parmi les bâtisseurs de l’ombre qui se cachent derrière les succès des hockeyeuses de la région, on retrouve Lise Lemaire. Portrait de cette passionnée du sport national des Canadiens… et des Canadiennes!
Native de Drummondville, Lise Lemaire a d’abord fait sa marque comme hockeyeuse au sein d’une équipe de Saint-Hyacinthe évoluant dans la ligue féminine senior C provinciale. Aux côtés de Danielle Goyette et France Montour, qui ont plus tard gravi les échelons jusque sur la scène internationale, la joueuse de centre a notamment participé à deux championnats canadiens.
«J’ai joué à Saint-Hyacinthe durant cinq ou six saisons, après quoi j’ai accroché mes patins pour fonder une famille. À l’époque, le hockey féminin passait bien après le hockey masculin. Les filles n’avaient pas la possibilité de pratiquer chaque semaine, mais seulement une fois de temps en temps, quand on dénichait une heure de glace, souvent très tard le soir», raconte celle qui travaille aujourd’hui au sein du Groupe Data.
Aujourd’hui mère d’un garçon de 19 ans et d’une fille de 14 ans, Lise Lemaire a rapidement renoué avec sa passion lorsque ses enfants ont commencé à jouer au hockey.
«J’ai d’abord voulu m’impliquer comme entraîneuse au prénovice, mais c’était difficile. C’était mal vu qu’une fille dirige des garçons. Je n’ai pas forcé la note, mais quand ma fille s’est mise au hockey, je me suis impliquée à nouveau. La première année, ma fille a joué dans une équipe de garçons, mais la saison suivante, Marc Lapointe –le grand manitou du hockey féminin à Drummondville– a mis sur pied une équipe féminine novice appelée les Mystiques. C’est là qu’il est venu me chercher comme bénévole. J’ai attrapé la piqûre et c’est comme ça que mon aventure dans le hockey mineur a commencé», témoigne celle qui occupe le siège de présidente de l’Association de hockey mineur de Drummondville depuis maintenant six ans.
Encore aujourd’hui, Drummondville est l’une des seules villes québécoises à offrir du hockey féminin de calibre prénovice à atome. Ses joueuses doivent donc apprendre «à la dure», en affrontant d’abord des équipes de garçons. Ce n’est que lorsqu’elles atteignent le calibre pee-wee que les Drummondvilloises joignent le programme des Élites AA de l’Estrie, une organisation évoluant au sein de la Ligue de hockey féminin de développement du Québec.
«Quand les filles affrontent les garçons, les victoires se font très rares. Mais comme elles sont toujours ensemble sur la glace, il finit par se créer des affinités et ça va de mieux en mieux. Par exemple, les filles de la première cuvée (2004) ont toujours persévéré, ce qui a fini par porter fruit. Aujourd’hui, elles connaissent beaucoup de succès avec les Élites. Elles s’impliquent aussi auprès des jeunes du prénovice, pour qui elles sont de véritables modèles», explique Lise Lemaire.
Cette saison, les Élites ont fait la pluie et le beau temps dans les circuits pee-wee et bantam québécois. Ces deux équipes sont d’ailleurs considérées comme les favorites pour remporter la Coupe Dodge dans leur catégorie respective, cette fin de semaine.
«On a toujours cru à ce projet, indique Lise Lemaire. Aujourd’hui, nos équipes sont jalousées partout au Québec. L’hiver prochain, le Centre-du-Québec sera d’ailleurs le club à battre aux Jeux du Québec, à Saguenay.»
Grâce au dévouement de Lise Lemaire et de ses acolytes, bien peu de hockeyeuses drummondvilloises font aujourd’hui le choix d’évoluer au sein d’équipes masculines. Pourtant, dans certaines régions du Québec, les responsables ont encore de la difficulté à convaincre les filles d’opter pour le hockey féminin.
«C’est le cas dans Chaudière-Appalaches, où ils doivent vivre avec l’effet Marie-Philip Poulin, qui a gravi les échelons dans le hockey masculin. Ici, on a plutôt la chance d’avoir l’effet Nancy Drolet, qui a ouvert beaucoup de portes pour le hockey féminin. Et puis, ce qu’on leur offre est très alléchant. En choisissant le hockey féminin, nos filles ont l’opportunité de participer au prestigieux tournoi de la Coupe Capitale Bell d’Ottawa et de représenter le Canada au tournoi international BSR», soutient Lise Lemaire, qui fait partie du personnel d’entraîneurs de la formation bantam AA des Élites.
Profitant de l’engouement régnant autour du hockey féminin, Lise Lemaire a mis sur pied un programme sport-études en hockey féminin à l’école secondaire Marie-Rivier il y a deux ans. Sous la supervision de l’ex-Voltigeur Éric Plante, les 14 joueuses du programme sont soumises à des séances d’entraînement où l’accent est mis sur la tactique individuelle.
Au rythme où vont les choses, il ne faudrait pas se surprendre si une hockeyeuse de la région parvient à faire le saut au sein de l’équipe nationale canadienne d’ici quelques années. Déjà, quelques Drummondvilloises sont pressenties pour faire partie de la formation féminine des moins de 16 ans du Québec.
«Au fil des ans, on est devenus un comparatif pour les gens de Hockey Québec», précise Lise Lemaire.
Malgré les succès du modèle drummondvillois, il n’en demeure pas moins que le hockey féminin québécois a encore beaucoup de chemin à parcourir avant d’obtenir ses lettres de noblesse. Sur les quelque 90 000 joueuses pratiquant ce sport au Canada, on en dénombre seulement 9000 au Québec, comparativement à 70 000 en Ontario.
«On est en avance sur les États-Unis, mais on est encore loin de l’Ontario, où le hockey féminin a sa propre association. Au Québec, les gens s’ouvrent les yeux tranquillement. Le hockey féminin est en effervescence, mais il y a encore des barrières à défoncer. Si nos hockeyeuses drummondvilloises peuvent aider à en défoncer quelques-unes, j’en serais très heureuse», affirme Lise Lemaire, qui rêve de voir une équipe de hockey féminin naître au Cégep de Drummondville.
Lorsqu’elle prend le temps de s’arrêter pour regarder le chemin parcouru par les hockeyeuses québécoises au fil des ans, Lise Lemaire ne peut dissimuler un brin de fierté. Ce qui l’enthousiasme le plus dans son implication, c’est d’ailleurs le fait de donner ce qu’elle n’a pu recevoir durant sa carrière de hockeyeuse.
«Le hockey a toujours été une passion pour moi, mais je n’ai jamais pu jouer autant que je voulais. Aujourd’hui, nos joueuses ont l’opportunité de pratiquer leur sport favori plusieurs heures par semaine. Plus je leur fais vivre de beaux moments à travers le hockey, plus ça me rend heureuse», conclut Lise Lemaire.