Guylaine Cloutier n’oubliera jamais cette idée de simplicité volontaire qui l’a animée, elle et son amie de longue date, France, lors de la période des Fêtes, puisque leur résolution mi-figue, mi-raisin a débouché sur un gain de cinq millions $ à la loto.
Ces deux Drummondvilloises ont plusieurs points en commun dont la copropriété d’un duplex permettant à chacune d’elles d’avoir son logement et de bénéficier presque au quotidien de la complicité l’une de l’autre.
De plus, autre similitude, toutes deux sont des enseignantes de carrière ou, devrions-nous dire, étaient car depuis le 27 janvier 2012, leur vie a basculé dans la direction contraire à celle du virage envisagé.
C’est que, ayant décidé de vivre l’expérience d’une tâche réduite après une trentaine d’années dans le milieu de l’enseignement avec tout ce que cela implique comme conséquences au plan financier, les deux amies, qui ont l’habitude de se gâter mutuellement à Noël par un échange de généreux cadeaux, ont convenu de mettre en pratique la notion de «simplicité volontaire» cette fois-ci du moins.
C’est donc dans cet esprit que Guylaine a offert un agenda à sa voisine et amie et que cette dernière lui a donné en retour un billet de la loterie Célébration.
«Je me suis dit: "Pauvre France! Elle vient de gaspiller 20 $" et je lui ai même reproché de nourrir ainsi l’État de nos pauvres deniers», raconte Mme Cloutier qui a accepté de partager en exclusivité son histoire avec le représentant de L’Express.
Jadis consommatrice de billets de loterie, en groupe plus particulièrement, celle-ci avait manifestement perdu beaucoup de ses illusions depuis plusieurs mois, d’où son manque d’enthousiasme apparent pour cet inattendu cadeau, surtout en période de… simplicité volontaire.
Sous le choc
Toujours est-il que le vendredi 27 janvier, soit presque deux semaines après le tirage télévisé de la Loto-Célébration, Guylaine Cloutier se rend à l’épicerie Mi Jo Saucisserie, rue Notre-Dame, pour y faire quelques achats.
Le moment de payer venu, la jeune quinquagénaire aperçoit dans son sac à main le fameux billet de la Célébration d’où sa décision d’en finir avec ce cadeau qui, selon elle, renferme plus souvent qu’autrement de faux espoirs bien plus que des gains.
L’idée de mettre la main sur le gros lot ne lui a surtout jamais effleuré l’esprit, et ce, à juste titre car, selon les statistiques de Loto-Québec, les chances de se l’approprier étaient de 1 sur 2 700 000.
La scène qui a suivi la validation du fameux billet, telle que décrite par Mme Cloutier, mériterait presque à elle seule un scénario pour l’écriture d’une comédie à la Gilles Latulippe, tellement la jeune caissière et la nouvelle millionnaire se sont relancées l’une et l’autre dans leur incrédulité réciproque et dans la confusion de tous ces zéros.
Ce vaudeville improvisé s’est déroulé en présence de quelques témoins ébahis dont la responsable du comptoir des viandes qui a bien repéré un son très inhabituel en provenance de la machine de Loto-Québec.
Pour faire une histoire courte, et avouant même en avoir perdu de petits bouts, Guylaine s’est retrouvée assise sur une chaise avec une serviette d’eau froide dans le cou, tentant de comprendre ce qui venait de lui arriver, bien consciente toutefois que sa vie venait de basculer.
«Je me souviens d’avoir eu une pensée pour des êtres chers décédés, y compris ma mère dont j’ai pris soin dans les dernières années de sa vie et qui m’avait dit qu’elle me récompenserait après son départ en me faisant gagner à la loterie», a confessé celle qui a ajouté en riant qu’elle n’en attendait pas tant tout de même.
Malgré ou, à cause même de l’ampleur du gain, Guylaine dit conserver un souvenir doux amer de ces moments passés devant le comptoir.
Heureusement, le propriétaire du commerce, Michel Houle, est venu à la rescousse en l’amenant à l’écart dans son bureau.
Il va sans dire que Guylaine a tout de suite demandé à communiquer avec la «responsable» de tout ce qui lui arrivait pour l’inviter à venir la rejoindre au dépanneur.
Finalement, après un essai infructueux, c’est en passant par la fille de France que le contact a pu se faire pour une invitation à venir prendre connaissance d’un gain significatif à la Célébration, sans en dévoiler l’importance.
Une fois sur place, mère et fille furent informées de la teneur de ce gain quasi miraculeux, ce qui a donné lieu (note à M. Latulippe peut-être) à un autre épisode de la chaise et de la serviette d’eau froide.
Le partage
Gagnante donc d’un lot de 5 millions $, Guylaine Cloutier a vite mis en pratique le dicton qui veut qu’il y a plus de plaisir à donner qu’à recevoir.
C’est ainsi que la détentrice du billet gagnant a d’abord réussi à convaincre France d’accepter une partie de ce lot que cette dernière a par la suite décidé de partager à son tour avec ses proches.
Personne ne sera surpris d’apprendre que Guylaine, la benjamine d’une famille de neuf enfants, en a fait de même avec les siens.
«Le plus urgent pour moi était de partager avec mon monde. Je ne voulais surtout rien savoir de garder tout cet argent pour moi seule», a confié cette femme généreuse de nature.
C’est ainsi que ses huit frères et sœurs, ses huit neveux, ses sept petits-neveux et quelques autres proches ont eu droit chacun à une belle portion de cet étrange cadeau de Noël.
Incidemment, le 31 janvier dernier, plusieurs membres des deux familles ont accompagné la nouvelle millionnaire à bord d’autant de limousines pour une randonnée jusqu’au siège social de Loto-Québec afin de prendre possession de cette manne, un autre moment particulier même si l’attente fut très longue.
Si Guylaine Cloutier a été plutôt raisonnable pour son premier achat, soit une boîte à lettres pour remplacer celle emportée par le vent quelques jours plus tôt, elle a été un peu plus dépensière la seconde fois car c’est une maison jumelée dont elle a fait l’acquisition.
Et devinez qui sera sa future voisine? Bien sûr, sa complice de longue date.
Il ne faut pas croire pour autant que la nouvelle retraitée a l’intention de dilapider son argent car déjà elle a fait les placements nécessaires, et ce, après avoir fait les dons aux organismes de charité de son choix.
Les principales gâteries qu’elle s’offrira sont probablement quelques voyages dont un très bientôt en Indonésie pour aller y joindre sa sœur aînée déjà en périple là-bas.
Chose certaine, Guylaine espère que son monde ne changera pas car, de son côté, elle a bien l’intention de ne pas changer…sans aller trop loin dans la simplicité volontaire cependant.