Les dernières semaines auront été plutôt mouvementées dans la vie du Drummondvillois d’adoption Yves Samson. Celui qui dirigeait les communications du député bloquiste Roger Pomerleau, défait le 2 mai dernier, a été ordonné prêtre anglican au moment où la dernière campagne électorale prenait son envol. Pour lui, la politique et la religion sont deux mondes différents qui partagent un objectif commun : être au service des gens.
Baptisé dès son jeune âge catholique romain, Yves Samson est issu d’une famille religieuse où il était normal de fréquenter la messe tous les dimanches. «Ça s’inscrivait dans l’ordre des choses», avance l’homme de foi, natif de Sherbrooke.
Vers la fin de l’adolescence, Yves Samson a travaillé au sein d’une équipe paroissiale, sous le mandat de l’évêque catholique, dans le but de cheminer vers l’ordination. «J’ai appris tôt la valeur de l’engagement», laisse-t-il tomber.
Mais un aspect de sa personnalité faisait jaser, si bien qu’à un moment donné, l’évêque a validé auprès de lui des rumeurs à l’effet qu’il était homosexuel. Le principal intéressé a acquiescé, lui qui acceptait déjà ouvertement son orientation sexuelle.
«À cause de votre aveu, je vous refuserai aux ordres», lui avait-il communiqué.
Un dur coup
Yves Samson a durement encaissé le coup. «J’ai éprouvé beaucoup de difficultés à vivre avec ce refus. C’est pourquoi j’ai décidé de mettre ce projet en veilleuse», relate celui qui a tout de même réussi à mener une vie professionnelle active.
Avec la verve qu’on lui connaît, ce communicateur s’est taillé une place comme journaliste et animateur à la radio. Il a aussi œuvré comme directeur de funérailles, où il avait l’occasion d’assister les gens dans le besoin.
En 2000, il a atterri, comme il dit, en politique, alors qu’il a secondé pendant plusieurs années la défunte députée bloquiste de Drummond à la Chambre des communes, Pauline Picard.
Il a occupé des fonctions semblables auprès du député péquiste de Verchères, Stéphane Bergeron, pour ensuite revenir dans la circonscription aux côtés de Roger Pomerleau, qui a récemment représenté le Bloc québécois dans Drummond jusqu’à sa défaite, le 2 mai dernier.
Yves Samson appréciait la relation d’aide que lui conférait son implication politique. «Les gens se présentaient à nous avec toutes sortes de problématiques», illustre-t-il.
En 2000, ce dernier a débuté une formation en théologie à l’Université Laval, qu’il a suivie à distance, à temps partiel. Détenteur d’un baccalauréat, il tient d’ailleurs à remercier ses anciens employeurs pour la conciliation travail-études qu’ils lui ont permis.
Entretemps, il continuait à avancer dans la vie avec foi. «Je pratiquais sans trop savoir où j’allais atterrir. Pendant une longue période, je n’ai pas été attaché à l’Église», explique celui qui est toujours demeuré de profession chrétienne.
«J’ai frappé à la porte de l’Église Unie du Canada, une Église inclusive qui admet qu’un prêtre soit marié, divorcé ou homosexuel. On m’acceptait à condition que je refasse ma formation en anglais et que j’aille travailler n’importe où au Canada», se souvient-il.
Cette proposition ne l’enchantait guère. «Ils m’ont dit que si je n’étais pas prêt à faire ce qu’on me demandait, c’est que ce n’était pas le bon chemin à suivre. Sur le coup, j’ai trouvé ces paroles percutantes, mais ils avaient raison», rapporte-t-il.
L’Église anglicane près de ses racines
Au tournant de la quarantaine, il a découvert la paroisse anglicane francophone de Québec. «Malgré certaines différences au niveau liturgique, j’ai trouvé que c’était très près de mes racines», résume Yves Samson, fier que l’Église anglicane célèbre dans les deux langues. Il apprécie particulièrement son fonctionnement démocratique, où le pouvoir n’est pas entre les mains d’une seule personne.
«Les Écritures permettent de remettre en cause notre manière de croire. Il faut se dépouiller de ce qu’on sait déjà, se débarrasser de notre conception spontanée. Le message du christianisme en est un de tous les jours», explique ce dernier qui, en 2008, a été nommé ministre laïque.
Lorsque l’évêque Monseigneur Drainville lui a demandé s’il avait envoyé une demande au comité diocésain pour son ordination, Yves Samson a rapidement constitué son dossier, sachant que l’Église anglicane accepte que les femmes, les personnes homosexuelles et les personnes en couple accèdent à la prêtrise.
Réuni avec 19 autres candidats, le révérend a passé une fin de semaine sous l’observation de 19 responsables qui devaient évaluer le comportement de chacun, à savoir si les participants étaient capables de vivre en société, d’animer la vie d’un groupe, de rendre compte de leur foi, etc.
«Au terme de toutes les rencontres, le verdict des 19 examinateurs devait être unanime», met en contexte celui qui a réussi le test avec succès.
Yves Samson n’en croyait pas ses oreilles. Une de ses professeures en relation d’aide a alors su le réconforter. «Ton heure est venue. Ça fait des années que tu attends», lui avait-elle fait remarquer.
C’est ainsi que le 27 mars 2011, Yves Samson a été ordonné à la prêtrise, en l’Église anglicane St. George de la rue Queen à Lennoxville.
Comme il souhaitait travailler en français, Yves Samson s’est vu octroyer la responsabilité de la Paroisse St James de Trois-Rivières. «Selon moi, il y a quelque chose à faire au Québec», croit-il.
Cette tâche, le nouveau prêtre l’accomplit avec la même passion, tout comme ses engagements passés où il a accompagné bénévolement des prisonniers et des personnes mourantes.
Pour lui, la Bible représente rien de moins que la vie ordinaire. «Le message de l’évangile n’a jamais été aussi d’actualité. Il rappelle que l’essentiel est de prendre soin de l’autre dans une société chavirée», exprime-t-il.
Yves Samson est aujourd’hui en paix avec son parcours, qui en est un de réconciliation avec sa profonde vocation.