Après avoir pris la direction de la prison pour avoir commis des agressions à caractère sexuel de 1993 à 2007, Gérald Hébert laisse derrière lui neuf victimes. Certaines d’entre elles restent encore affectées par les crimes qu’il leur aura fait subir.
Les deux principales victimes se sont confiées à L’Express après la sentence de cinq ans d’emprisonnement qu’a rendue la juge Hélène Fabi, le 1er février dernier.
Elles sont aujourd’hui âgées au début de la trentaine, mais lorsque M. Hébert les a agressées la première fois, elles venaient à peine de célébrer leur 14e anniversaire. C’était la veille de Noël, en 1993.
Contrairement aux autres victimes qui ont principalement fait l’objet d’attouchements sexuels, ces deux femmes ont subi des agressions complètes, et ce, pendant environ trois ans.
La médiatisation d’une première vague de jeunes victimes les aura motivées à porter plainte.
Manipulées par leur amour des chevaux
Gérald Hébert était propriétaire d’un ranch qu’il exploitait avec sa conjointe. Ses victimes étaient âgées entre 13 et 17 ans, à l’exception d’une adulte de 30 ans. Elles ont toutes travaillé pour l’accusé, étant chargées de prendre soin des chevaux, au ranch ou lors de compétitions aux quatre coins du Québec. Durant les fins de semaine, il arrivait à certaines d’entre elles de coucher à la résidence de l’accusé.
Sur le lot des victimes, une seule a démissionné sitôt après les premiers attouchements. «Alors qu’elle attendait l’autobus, l’accusé qui circulait en voiture lui a offert de la raccompagner chez elle. Ce dernier lui a ensuite demandé la permission de photographier ses seins. Elle a refusé, et c’est à ce moment qu’il a entré ses mains de force sous son soutien-gorge. Elle a réussi à sortir du véhicule et à s’enfuir», est-il noté dans le jugement.
La victime a cessé de travailler chez l’accusé puisqu’elle considérait son attitude et son langage déplacés.
L’une d’entre elles a admis avoir enduré les agressions parce qu’elle n’avait pas l’âge de pouvoir posséder ses licences pour entraîner ses chevaux, qui étaient entreposés à ce ranch du 4e rang à Saint-Cyrille. Dès qu’elle a eu 16 ans, elle s’est empressée de couper les ponts. «Il nous manipulait par notre amour des chevaux», souligne-t-elle.
Il continuait à exploiter le ranch
Les deux victimes qui se sont confiées à L’Express étaient sidérées de savoir que Gérald Hébert continuait d’exploiter le ranch durant les quatre années de procédures judiciaires. Elles étaient aussi stupéfaites de constater que bon nombre de parents lui confiaient toujours leurs jeunes.
Il était interdit par la Cour à M. Hébert d’être en contact avec des mineurs (sauf ses petits-enfants) sans la présence d’un autre adulte. Mais comme cette personne était habituellement sa conjointe, qui n’avait rien vu pendant toutes ces années, les victimes trouvaient que les conditions étaient trop clémentes.
Quant à la sentence, elles admettent avoir souhaité une peine plus sévère. Quoique le mal était fait…
«Depuis les événements, les victimes ont toutes éprouvé des difficultés d’ordre sexuel. Elles ont vécu de l’anxiété, de la peur, de l’insomnie et la perte d’estime d’elles-mêmes. Dans le cas d’une des victimes, elle a même fait une tentative de suicide. Depuis, elle est suivie en psychiatrie. Plusieurs d’entre elles ont consulté un psychologue, dû à des séquelles profondes et importantes avec lesquelles elles doivent continuer à vivre», peut-on lire dans le jugement.
Dans les circonstances, le tribunal est d’avis qu’il s’agit d’un cas où la protection de la société doit être priorisée. Selon lui, la culpabilité morale de l’accusé est grande, d’autant plus qu’il refuse toujours de reconnaître sa déviance sexuelle et de s’impliquer dans un programme de traitement pour abuseurs sexuels.