Alain Préfontaine est un passionné de hockey, pour voir plus de 300 parties par saison, nul doute, il faut être un véritable passionné de notre sport national. Afin d’en apprendre sur les rouages d’un recruteur dans le hockey, tout en apprenant à connaitre l’homme, je me suis entretenu avec celui qui se trouve à être le nouveau recruteur-chef des Remparts de Québec.
On sait tous qu’un recruteur est payé pour voir des parties et évaluer les joueurs qui se trouvent sur la patinoire, mais dans le cas d’un recruteur-chef, c’est beaucoup plus que ça. Dans son cas, il a six gars à sa charge et doit assigner à chacun d’entre eux un territoire dans lequel ils vont pouvoir assister à plus d’une centaine de parties, environ 150 matchs pour être plus précis. Tout cela en plus de s’occuper de l’administration et des allocations de dépenses.
Tous ces hommes assistent à des parties de trois calibres différents, soit le midget AAA, AA et midget espoir. À savoir ce qu’ils observent vraiment, il s’agit de quatre points précis : le patin, le sens du hockey, le caractère, la constance et, évidemment, le gabarit. Chaque équipe, selon les années, a des besoins différents, c’est pourquoi on ne peut pas mettre ces points par ordre précis, d’autant plus que le hockey n’est pas une science comme l’exprime si bien l’homme de 53 ans.
Dans le cas des Diables rouges, le travail de tout ce beau monde commence véritablement après le camp d’entraînement. À ce moment précis, il assigne les territoires de chacun pour que tous puissent travailler dans un cadre précis, jusqu’à la prochaine rencontre, en décembre. Il s’agit de la première rencontre en groupe depuis le début de la campagne.
Lors de cette réunion de la saison, M. Préfontaine demande à ses employés de fournir une liste d’au minimum 54 noms et doivent être classés par position en excluant les gardiens. L’homme de hockey, originaire de Granby, exige également d’avoir un top 10 par position.
Une seconde réunion a lieu en février et la date n’est pas choisie au hasard. C’est tout près du début des séries. «On cible les joueurs qu’on veut vraiment surveiller pour avoir une meilleure idée d’eux», a-t-il dit. Il ajoute qu’en séries, certains joueurs peuvent améliorer leur rang de sélection en connaissant une explosion soudaine lors du tournoi printanier. Le contraire est aussi vrai, il peut glisser sur la liste des Remparts s’il devient soudainement invisible. «On est conscient du potentiel du jeune s’il a connu une bonne saison et même avec une mauvaise léthargie au mauvais moment, il ne glissera pas du 2e au 22e échelon non plus.»
Après les séries, il y aura une rencontre finale en mai, qui aura pour but d’établir une liste de 145 noms en vue du repêchage qui a toujours lieu en juin. Tous seront contactés par téléphone afin d’en apprendre sur ces individus. De ce nombre, environ une soixantaine seront rencontrés en personne avec les parents du joueur en question. Le but de cette rencontre est de vérifier l’intérêt, est-il vraiment intéressé à venir jouer dans la LHJMQ ou s’il lorgne les collèges américains? C’est le genre d’information nécessaire et primordiale pour toutes les formations du circuit.
Il me précise que le «nous» est plus important que le «je» dans l’équipe de recrutement des Remparts. Il aime des gens qui s’expriment, mais n’en demeure pas moins que les décisions se prennent en groupe.
Comme dans chaque entrevue que je fais, il est toujours intéressant d’en apprendre un peu plus sur le passé de la personne en question. Dans ce cas-ci, la carrière en tant que recruteur a commencé en 1982 pour Alain Préfontaine. Elle a d’ailleurs commencé d’une drôle de façon. Sans expérience, il s’est retrouvé comme recruteur-chef des Bisons de Granby. Ces derniers avaient déjà engagé quelqu’un en début de saison, mais rendu en décembre, l’équipe n’avait toujours reçu aucun rapport, ni reçu de nouvelle de cette personne. C’est ainsi qu’il s’est retrouvé au poste de recruteur-chef par intérim pour le restant de la saison. Il a finalement occupé ce poste de 1982 à 1987. Durant cette période, il a repêché l’un des meilleurs gardiens de l’histoire. « J’ai sélectionné mon patron actuel, Patrick Roy, en deuxième ronde. Il a été le deuxième gardien recruté lors de cet encan, derrière Alain Raymond qui avait été choisi par les Olympiques de Hull», a-t-il raconté avec fierté.
Pour ceux qui se demandent qui est Alain Raymond, il était entraîneur des gardiens avec les Bulldogs d’Hamilton la saison dernière.
En 1987, il a quitté les Bisons pour être employé par les Cataractes et le regretté Ron Lapointe. «J’ai vraiment adoré travailler sous ses ordres», a-t-il confié, en spécifiant qu’il n’était pas le recruteur numéro un de cette organisation. Il a occupé cette fonction jusqu’en 1994.
À ce moment, il a pris une pause afin de regarder ses enfants grandir et pouvoir suivre leur évolution dans le hockey.
Chassez le naturel, il revient au galop, il a repris du service en 2000 pour les Castors de Sherbrooke, qui sont devenus ensuite les MAINEiacs de Lewiston. Comme tous les autres recruteurs, il a quitté le bateau en 2007 après la conquête de la coupe du Président. À la suite du départ de Clément Jodoin pour l’Océanic de Rimouski, cela à engendrer plusieurs changements, notamment au niveau du recrutement, ni lui, ni ses collègues ne voulaient continuer ainsi. «Le nouveau avait sa vision à lui, qui était différente de la mienne. On pense tous un peu différemment (les recruteurs), mais ses idées ne rejoignaient vraiment pas les miennes.» C’est à ce moment-là que les Remparts de Québec lui ont fait signe. Il évoluait sous les ordres de Jean Gagnon. Étant donné que M. Gagnon est devenu l’adjoint au directeur général à la fin de la plus récente campagne, l’homme qui travail également pour la brasserie Labatt a pris la relève.
Au niveau de ses réalisations avec les Diables rouges, il est fier d’avoir sélectionné Martin Lefebvre. Celui-ci a été un choix de troisième ronde, 54e au total en 2008 par les Remparts. «On est heureux de ce choix, car il connaît une belle carrière junior.»
Plus récemment, il est très élogieux envers leur sélection de 7e ronde, 122e au total, Ryan Culkin. «Ce gars-là a un potentiel pour jouer dans la Ligue nationale» d’affirmer M. Préfontaine sans la moindre hésitation.
Étant surpris par cette affirmation, il m’a expliqué que Culkin jouait dans le midget AA l’an passé, il aurait dû évoluer pour les Lions du Lac-St-Louis, mais il avait été retranché, car on le voyait derrière des défenseurs tel que Michael Matheson et Marc Biega. Culkin a tout de même eu la chance de porter le #99 à 13 reprises avec les Lions.
Alain termine l’entretien de belle façon. «Parfois, ça prend du pif, comme dans le cas de Culkin.»