Valérie Jutras et Roger Naegeli n’ont pas gagné le gros lot de la Poule aux œufs d’or, mais c’est tout comme, et ce, grâce au Syndicat des producteurs d’œufs d’incubation du Québec (INCOBEC).
Le jeune couple de Sainte-Brigitte-des-Saults a en effet mérité le prêt à vie d’un quota lui permettant de produire annuellement quelque 900 000 œufs certifiés, soit les fruits du travail de 6000 poules, sans oublier l’apport des 600 coqs qui complètent la basse-cour.
D’ailleurs, un premier contingent de poules d’une vingtaine de semaines et de coqs a pris place depuis quelques jours dans les installations ultra modernes que les Naegeli/Jutras ont construites sur leur ferme du rang 9 où ils besognent déjà dans les grandes productions.
Favoriser la relève
Lundi avant-midi, lors d’une conférence téléphonique, Gyslain Loyer, président d’INCOBEC, et Valérie Jutras, une productrice qui ne manque pas d’enthousiasme, ont fait le point sur cette heureuse nouvelle.
Comme l’a d’abord expliqué M. Loyer, le Syndicat des producteurs d’œufs d’incubation du Québec, dans le but de favoriser l’établissement de nouveaux producteurs, a mis sur pied en 2008 un concours destiné à des gens de 18 à 40 ans attirés par cette production.
Ceux-ci devaient avoir une expérience agricole d’au moins un an mais ne devaient avoir jamais détenu de quotas, que ce soit dans les œufs, la volaille ni même le lait, et ne devaient pas être des membres immédiats d’une famille ayant bénéficié de tels quotas au cours des 10 dernières années.
De plus, il fallait que les candidats s’engagent à préparer un plan d’affaires approuvé, à négocier une entente avec un couvoirier pour la vente de leurs œufs et à présenter la formation requise.
Comme cela n’était pas suffisant, le gagnant du quota de 900 000 œufs devait être propriétaire à 100% de la ferme et le demeurer pour la durée de l’exploitation du quota prêté.
Le quota pourra être transférable toutefois à un membre de la famille immédiate ayant acquis la ferme, une possibilité à long terme que se plaisent à envisager Roger Naegeli et Valérie Jutras qui sont les parents de quatre beaux enfants.
Au terme du processus, six candidatures ont été retenues par le comité mandaté par le SPOIQ et c’est finalement le couple de Sainte-Brigitte-des-Saults qui est devenu le premier bénéficiaire de ce Programme d’aide à la relève agricole.
Il faut dire, comme en convient Gyslain Loyer, qui est également président des Producteurs d’œufs d’incubation du Canada (POIC), qu’il s’agit de la production la moins connue de l’industrie avicole.
Au Québec, par exemple, on ne retrouve qu’une cinquantaine de producteurs.
Ce sont d’ailleurs ces derniers qui, en cédant une petite partie de leur quota, ont permis la création de ce Programme pour l’établissement de nouveaux producteurs.
Pour les Naegeli/Jutras, il s’agit donc de quelques centaines de milliers de dollars (on avance 900 000 $) qu’ils n’auront pas à investir pour joindre ce club sélect.
Toutefois, il ne faut surtout pas croire qu’ils n’ont pas eu à faire d’efforts considérables pour la construction d’un poulailler, pour l’achat des équipements et pour l’acquisition d’un premier troupeau.
De façon générale, comme nous l’a indiqué Gyslain Loyer, il faut compter environ 100 $ par poule lorsqu’un producteur s’implante dans le secteur de la production d’œufs d’incubation.
Sans commenter ces chiffres, Mme Jutras a néanmoins affirmé que son partenaire et elle n’ont pas ménagé sur la qualité de la bâtisse et des installations puisqu’ils font de cet investissement un projet à long terme.
Le souci du détail
Valérie Jutras ne cache pas que c’est tout un défi qui les attend avec cette autre production, mais elle affirme du même souffle que toute l’attention et les généreux conseils que leur prodiguent les autres producteurs depuis le début de l’aventure sont un premier gage de succès. «Nous ne pouvons être mieux entourés que nous le sommes présentement par les gens du secteur, que ce soit par le Syndicat, par les autres producteurs que par les gens du couvoir avec lequel nous allons faire affaire», a exprimé Valérie Jutras en rendant hommage du même souffle au président Loyer. Selon la jeune productrice, outre le travail assidu, deux choses lui apparaissent essentielles pour mener à bon port cette entreprise, le souci du détail et la qualité du troupeau. «Il est aussi primordial que les poules soient à l’abri du stress et, si c’est le cas, elles vont donner leur surplus qui est l’œuf et, si c’est le contraire, vont le garder comme pour assurer leur survie», fait savoir Valérie Jutras en prenant l’engagement qu’elle sera une véritable mère poule pour ses volailles. Pour cette première expérience, les producteurs de Sainte-Brigitte-des-Saults, ont opté pour des Ross qui, avec les Cobb, sont les deux espèces préférées des producteurs d’œufs d’incubation du Québec. Comme mentionné plus haut, les poules nouvellement arrivées à Sainte-Brigitte-des-Saults ont déjà un peu plus de 20 semaines. C’est à partir de l’âge de 26 semaines, donc d’ici peu, qu’elles produiront leurs premiers œufs qui, pour ceux qui auront passé le test, seront acheminés au Couvoir Provincial à Victoriaville. Chaque poule devrait pondre quelque 150 œufs d’incubation au cours des 34 à 36 semaines suivantes, et après quoi, le cycle recommence avec de nouvelles poules de 26 semaines. Même si elle reconnaît que l’insécurité du début les tenaille quelque peu, son mari et elle, Mme Jutras affirme qu’ils se sentent réellement prêts à faire face à la musique. Se disant reconnaissant à l’endroit du Syndicat des producteurs d’œufs d’incubation du Québec pour cette belle initiative en faveur de la relève, Valérie Jutras encourage quiconque aura la possibilité de s’y inscrire à l’avenir de s’en prévaloir. Cela ne saurait trop tarder car, selon Gyslain Loyer, un comité relevant d’INCOBEC se mettra bientôt au travail pour préparer les règles du prochain tirage en vue du démarrage d’une nouvelle production en 2013. D’ici là, Roger Naegeli et Valérie Jutras auront eu la chance quant à eux de bien s’installer dans cette nouvelle production sans renoncer pour autant aux grandes cultures où ils ont déjà acquis leurs lettres de noblesse.