Auteure : Yolande Allard
«L’Université du 2», c’est ainsi qu’on a appelé, avec humour, l’école située à l’intersection du 2e Rang de L’Avenir et de la route de la Longue Pointe. On ne peut qu’admirer le dévouement sans limite démontré par les maîtresses d’école qui s’y sont succédé. On leur confie jusqu’à une trentaine d’enfants à qui elles doivent inculquer les rudiments du catéchisme, de la lecture, de l’écriture et de l’arithmétique, un enseignement qui va de la première à la septième année. Mademoiselle Letellier, entre autres, s’acquitte fort bien de sa tâche durant les années scolaires 1866-1867 et 1867-1868, puisque l’inspecteur Alexander note dans son rapport : «Justine Letellier mérite une mention toute particulière, les progrès y sont surprenants.» À la suite de sa visite du printemps 1873, il écrit : «L’école est […] bien dirigée par Sarah Bouthillette. Les progrès des élèves ont été satisfaisants.»
Pour ces valeureuses institutrices, la récompense ne viendra pas de bénéfices matériels, puisque leur salaire annuel est plafonné à 80 $ pour une période de 25 ans. En effet, de 1866 à 1891, diplômée ou pas, pédagogue ou pas, la maîtresse de l’école du 2e rang reçoit le misérable traitement de 80 $ pour les vexations et la fatigue de dix mois d’enseignement.
La contribution gouvernementale couvre à peine 10 % des dépenses d’exploitation des écoles publiques. Le reste du budget provient de la taxation des propriétés foncières qui s’élève, en 1877, à 50 ¢ du 100 $ d’évaluation. À titre d’exemple, le propriétaire d’une ferme évaluée à 350 $ doit verser 1,75 $ par année pour le maintien des écoles.
Des gamins astucieux
«La dernière année qu’on est allé à l’école, mes parents [Alma et Pancrace Allard] ont acheté par le catalogue Eaton une bicyclette de fille, noire parce que c’était 1 $ meilleur marché.
C’est Adélard Brousseau qui travaillait à La Pointe qui a monté la bicyclette. On avait trois milles à marcher! Rita, Normand et moi [Guy], on avait déterminé deux «spots». Un de nous trois faisait le trajet à bicyclette jusqu’au premier «spot» (un mille environ), il jetait la bicyclette à terre et continuait le trajet à pied. Les deux autres marchaient jusqu’à la bicyclette, un des deux la prenait pour un mille, puis la lâchait à terre et continuait le trajet à pied. Quand le troisième rejoignait la bicyclette, il l’enfourchait pour parcourir le dernier tiers du trajet. On arrivait tous ensemble à l’école.» (Source : Guy Allard, entrevue du 10 avril 2001) (Archives Yolande Allard)