Des quelque 700 entreprises serricoles que l’on retrouve à travers le Québec, celle de Luc Verrier, du secteur Saint-Joachim-de-Courval, risque bien d’être la plus épiée de toutes au cours des prochains mois et années car elle est au cœur d’un important projet qui tentera de démontrer que le bois peut être une alternative toute aussi valable, à tout le moins, aux autres sources d’énergie pour chauffer ses vastes espaces.
À la demande du Syndicat des producteurs en serre du Québec, M. Verrier a accepté non seulement de transformer ses installations pour mener à bon port ce projet de chauffage à la biomasse, mais il a donné son accord en même temps pour devenir une vitrine ouverte à tous ceux et celles désirant se familiariser avec ce concept.
Et pour ajouter un petit peu plus à la curiosité, les Serres Verrier ont entrepris le printemps dernier la culture de saules à croissance rapide, lesquels d’ici deux ans commenceront à alimenter une bonne partie des besoins du système de chauffage à la biomasse.
Plusieurs collaborateurs
Outre le Syndicat des producteurs en serre du Québec, d’autres collaborateurs sont aux premières loges dans le «Projet de chauffage à la biomasse en production serricole» dont le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) et l’Agence de l’efficacité énergétique qui apportent expertises et supports financiers. Le Centre d’information et de développement expérimental en serriculture (CIDES), pour la réalisation d’un audit énergétique, Agro Énergie, pour l’implantation de la culture de saules, et l’entreprise Transfab Énergie, le fournisseur de la chaudière et de ses composantes, ont tour à tour conseillé Luc Verrier et Jean Gobeil, chargé de projet pour la vitrine biomasse, tout en participant aux différentes phases de l’implantation de ce système. D’ailleurs, à les écouter parler les uns après les autres, on aura compris que tout n’est pas à point et que plusieurs ajustements et expérimentations devront être faits en cours de route car on est réellement à l’école avec ce projet. Mais ce n’est pas par hasard que tant de partenaires s’y intéressent lorsque l’on sait qu’en production de serre, les coûts énergétiques constituent le poste le plus important puisqu’ils représentent entre 15% et 30% des dépenses. De plus, comme la majorité des producteurs en serre ont recours aux produits pétroliers, ils sont donc sensibles aux variations des prix de l’énergie, d’où cet intérêt pour d’autres alternatives dont la biomasse forestière. Le recours au saule à croissance rapide ne fait qu’ajouter au côté inédit du projet puisqu’il représente, comme chez les Verrier, une opportunité intéressante pour les producteurs qui possèdent des terres plus ou moins utilisées et qui visent une forme d’autosuffisance. Luc Verrier a donc préparé dix hectares de terre le printemps dernier et y a planté quelque 160 000 saules à croissance rapide. Le printemps prochain, il répétera son manège sur dix autres hectares en corrigeant les petites erreurs qu’il a pu faire lors de son apprentissage avec cette culture mieux connue en Europe, même s’il a été bien conseillé. Le projet mené à Saint-Joachim-de-Courval permettra donc de documenter la performance du saule en croissance rapide en plantation sur les terres du producteur comme source de combustible pour le chauffage des serres. Il permettra également d’élaborer un modèle d’approvisionnement en biomasse qui intègre la biomasse du saule et un approvisionnement d’appoint en copeaux de biomasse forestière, M. Verrier continuant d’accueillir ses autres sources, sauf que le bois doit être déchiqueté en copeaux.
La chaufferie
Le projet permettra aussi d’évaluer la performance technique d’une chaufferie utilisant ce type de biomasse.
Aux Serres Verrier, la nouvelle chaufferie est constituée d’une chaudière de 55 HP, d’un réservoir d’hydro-accumulation, d’une réserve d’alimentation et d’une aire d’entreposage qui sera bientôt agrandie lorsque l’on aura récolté les premiers saules afin de permettre leur assèchement.
Mercredi dernier, dans le cadre d’une journée «portes ouvertes», une cinquantaine de visiteurs dont bon nombre de producteurs en serre ont pu observer le fonctionnement de la chaufferie et échanger avec ses concepteurs et les autres intervenants.
Chez les Verrier, sans entrer dans tous les détails techniques, l’alimentation se fait à l’aide d’une vis sans fin vers la chaudière où la combustion se fait.
La chaleur de la combustion est ensuite transférée à l’eau qui se trouve en circuit fermé, laquelle circule vers la serre pour la chauffer avant de revenir vers la chaudière pour être chauffée de nouveau.
Un réservoir d’hydro-accumulation permet d’entreposer les surplus de chaleur produits par la chaudière en période de chauffe peu élevée et de relâcher cette chaleur le moment venu.
Ces installations de haute technologie comprennent également un système de filtration des gaz de combustible ainsi qu’un récupérateur de cendres.
Déjà, l’on a acquis la certitude que cette façon de faire ne constitue pas une source d’émission de gaz à effet de serre et que le coût de cette énergie est très avantageux par rapport à celui du gaz naturel ou des produits pétroliers.
Bien sûr, on ne s’en cachera pas, les investissements pour de tels équipements sont supérieurs à ceux des systèmes plus conventionnels, si bien que l’expérimentation aux Serres Verrier sur une plus longue période aidera à mieux mesurer l’ensemble des avantages et inconvénients.
Comme mentionné en introduction, les intéressés ont l’opportunité de visiter cette vitrine biomasse et de découvrir du coup cette entreprise de Saint-Joachim-de-Courval qui produit principalement des tomates, des concombres et des piments à l’intérieur de 2000 mètres carrés de serres.