Fondée en 1925, Textiles Fortissimo, connue anciennement sous le nom Consoltex, est certainement l’irréductible entreprise locale oeuvrant dans le secteur du textile à résister à «l’ennemi chinois». Même si elle parvient à conserver une part du marché, le directeur de l’usine, Pierre Desroches, a précisé que son carnet de commandes est en dents de scie.
Après les fermetures des entreprises Teinturiers Élite (mai 2006) et Tricots dynamic (février 2007), voilà que Textiles Fortissimo, située rue Heriot, s’inquiète maintenant pour son avenir. «Les temps sont durs. Le marché du textile est très difficile et nous passons dans le paquet comme les autres. Nous ne savons pas si nous parviendrons à passer au travers et nous travaillons très fort pour assurer la viabilité de l’entreprise», a déclaré Pierre Desroches, jeudi dernier.
Contrairement à d’autres qui ont dû s’avouer vaincues, Textiles Fortissimo a développé une niche très précise, peu exploitée au Canada. «Si nous sommes encore ouverts aujourd’hui, c’est parce que nous sommes dans un créneau très spécial. Au Canada, nous sommes presque les seuls à faire du tissu d’ameublement. Si nous faisions du denim, comme la Swift Denim, ou des t-shirts, ça fait longtemps que nous serions fermés», a exprimé le directeur de l’usine.
Malgré son unicité, l’entreprise n’est pas à l’abri de la pression des pays émergents ni de la baisse de la devise canadienne. «D’avoir une niche bien précise ne règle pas tous les problèmes, confirme M. Desroches. Même avec les textiles techniques ou très spécialisés, les volumes ne sont pas importants et cela ne génère pas beaucoup d’emplois. Je suis sûr que les Asiatiques vont finir par exploiter ces marchés-là. C’est juste une question de temps». À son avis, seuls les consommateurs et une intervention musclée de l’État pourraient sauver le textile, et certainement d’autres entreprises manufacturières, au Québec. «Il faudrait que les gens décident d’acheter canadien ou québécois. Le gouvernement devrait aussi être plus restrictif dans l’entrée de produits étrangers. Aussi, toutes les restrictions environnementales ne nous aident pas. Au Canada, les compagnies doivent se conformer à un paquet de règles et, en Chine, il n’y a rien à ce chapitre», a manifesté M. Desroches.
Textiles Fortissimo exporte entièrement ses produits en Europe, en Russie et au Moyen-Orient. «Vu que nous exportons, la baisse du dollar canadien nous a grandement affectés. Nous avons de la difficulté à faire des prix pour rivaliser le marché», a précisé M. Desroches.
En ce moment, une quarantaine d’employés travaillent dans cette entreprise du centre-ville. Dans ses meilleurs jours, elle fournissait de l’emploi à quelque 150 individus. «Ici, la moyenne d’âge est élevée. Certains employés ont même dépassé le cap des 65 ans. Ils ne veulent pas arrêter de travailler, car ils aiment être ici. La situation les inquiète, mais pas autant que les plus jeunes», a ajouté l’homme, lui-même près de la retraite.
Convention collective
Par ailleurs, Textiles Fortissimo négocie actuellement une nouvelle convention collective avec le syndicat. Les parties sont actuellement en train de revoir une nouvelle entente pour les trois prochaines années.
«Nous négocions pour trois ans et, de façon générale, ça se passe bien. Nous espérons signer la convention le plus tôt possible», a commenté Pierre Desroches.
L’entreprise sera-t-elle encore active dans trois ans? «L’usine devrait encore être ouverte, mais je ne crois pas qu’elle fonctionnera à plein régime. Ça va sans doute être un peu comme maintenant avec un nombre d’employés similaire», a-t-il répondu, en guise de conclusion.