Pendant longtemps, le Centre-du-Québec a été «la» région au Québec où le salaire moyen était le plus bas. Ce n’est vraiment plus le cas. Les récentes statistiques compilées par Emploi Québec démontrent que c’est ici, au Centre-du-Québec, que la croissance du salaire hebdomadaire moyen a été la plus spectaculaire entre 2001 et 2006.
En cinq ans, le salaire des Centricois a crû de 21,7 %, pour atteindre 672 $, alors qu’en moyenne au Québec, pour la même période, il progressait de 10,8 % et de 11,9 % au Canada.
Entre les 611 $ que gagnent, en moyenne, les salariés du Bas-Saint-Laurent et les 740 $ qu’empochent ceux de l’Outaouais, les Centricois se situent désormais au 12e rang des 17 régions du Québec, ex aequo avec les Estriens. «On pouvait s’attendre à une croissance, mais jamais à ce point-là!», dit Éric Lampron, l’économiste d’Emploi Québec du Centre-du-Québec.
Ce rehaussement du salaire moyen des Centricois serait surtout attribuable aux changements de la structure régionale de l’emploi, observe Éric Lampron. La migration des emplois vers les secteurs spécialisés explique, en grande partie, la forte croissance des revenus de travail, estime-t-il.
L’économiste poursuit en disant qu’encore moins hier, on a de raisons de penser qu’à travail égal, les Centricois obtiennent une moins bonne rémunération qu’ailleurs au Québec.
Une donnée parmi tant d’autres
Ces données et observations sur les changements dans la structure régionale de l’emploi couplées aux plus récentes statistiques issues du dernier recensement permettent à l’économiste régional de fixer le nouveau portrait socioéconomique du Centre-du-Québec.
«Avec la Gaspésie, nous n’étions que deux régions au Québec, au printemps 2007, à produire une étude sur le marché du travail, les besoins de main-d’œuvre et les difficultés de recrutement», précise M. Lampron.
L’ayant enrichie des données sur la population, la migration et la disponibilité de la main-d’œuvre ainsi que les soldes migratoires, l’économiste régional s’apprêtait (jeudi) à présenter ce nouveau portrait aux membres de la Conférence régionale des élus.
Dès cet automne, annonce-t-il, une tournée s’organisera dans les cinq MRC du territoire pour dresser l’état de leur situation particulière et des défis qui les attendent au cours des prochaines années. «Nous avons, ici, à peu près les mêmes défis à relever que dans les autres régions du Québec. Avec ces nouvelles études, cela nous permet de prendre les devants», espère l’économiste.
Ce récent portrait montrera, par exemple, que la population régionale augmente moins vite qu’en moyenne au Québec, même qu’elle a déjà commencé à décroître dans Nicolet-Yamaska et dans L’Érable. Les MRC de la région devront aussi se confronter à une diminution de la population en âge de travailler, une baisse oscillant entre 5 à 20 %.
Les MRC apprendront aussi que la croissance de l’emploi a été, chez elles, inférieure à la moyenne provinciale entre 2001 et 2006, 6 % comparativement à 8,8 % pour le Québec. Son statut de «championne» manufacturière au Québec pourrait aussi lui jouer de mauvais tours, ce secteur étant plus à risques de décroissance.
Le salaire moyen a augmenté avec la spécialisation des emplois, mais, au Centre-du-Québec, les personnes en emploi sont moins scolarisées que la moyenne provinciale.
Ce plus bas niveau de scolarité s’explique, note encore Éric Lampron. Le Centre-du-Québec n’abrite pas d’université et regroupe moins de services gouvernementaux que d’autres au Québec.
Inacceptable décrochage
Si le taux de décrochage des jeunes Centricois n’est pas pire qu’au Québec, le «message est clair», selon l’économiste. «Le décrochage est inacceptable, alors qu’on sait que 75% des emplois requièrent tout au moins un diplôme d’études secondaires», souligne-t-il.
D’ailleurs, c’est au Centre-du-Québec que le taux de chômage des finissants de la formation secondaire professionnelle est le plus bas des 17 régions administratives, 5,7 %, comparativement à 9,7 %. Une formation collégiale constitue une meilleure garantie d’emploi; un taux de chômage de 4,8 %, 0 % pour six des dix programmes techniques.
De tout ce portrait socioéconomique, un fait se dégage aux yeux de l’économiste régional. Dès qu’un employeur de chez nous a besoin d’un travailleur spécialisé (possédant un diplôme professionnel, technique ou universitaire), il éprouve des difficultés de recrutement. Près de 40 % des entreprises de cinq employés et plus ayant affiché des postes n’avait toujours pas recruté de candidats après trois mois.
Les difficultés de recrutement peuvent avoir des conséquences négatives pour les entreprises, plus tentées par la sous-traitance ou par le déménagement de leurs activités. Pire, certaines pourraient fermer.
Cet automne, les MRC seront invitées à se mettre au boulot pour contrer, de toutes les manières, les difficultés de recrutement de main-d’œuvre!