COURSE AUTOMOBILE. Le sport automobile, c’est une affaire de famille chez les Clair. Suivant les traces de leur paternel René, les frères Gino et Mario connaissent une brillante carrière dans le milieu des courses de stock-car sur terre battue. Une troisième génération de Clair se prépare aujourd’hui à prendre la relève.
À l’âge respectable de 77 ans, René Clair entretient sa passion pour les courses depuis maintenant presque six décennies. Il a donné ses premiers tours de roue sur la piste de go-kart située derrière la résidence familiale, à Saint-Edmond-de-Grantham.
«Plus jeune, j’allais voir les courses à l’ancienne piste de Drummondville. Un jour, mon beau-frère m’a demandé de le remplacer à Saint-Guillaume. J’avais 18 ans. La première fois que j’ai participé à une course, j’ai trouvé que ça allait vite. Le vendredi suivant, c’était une épreuve de championnat… et je l’ai gagnée! C’est comme ça que j’ai attrapé la piqûre», se souvient le patriarche de cette famille tissée serrée, qui a accueilli L’Express au garage familial situé sur la route 122.
Devenu une véritable légende du stock-car au Québec, le multiple champion René Clair a mis un terme à sa carrière en 1990. Il n’a toutefois pu résister à la tentation de reprendre son volant bien longtemps. «Aujourd’hui, je course seulement à Drummond. J’utilise la vieille voiture et les pièces dont Gino n’a plus besoin. Et je m’amuse très bien avec ça! Je vais continuer tant que la santé va me le permettre. C’est mon docteur qui va m’arrêter», explique celui qui est encore actif dans le milieu de la construction en compagnie de ses fils.
Il faut croire que le septuagénaire n’a rien perdu de ses réflexes. Plus tôt cette saison, il a fait vibrer les spectateurs en montant sur la plus haute marche du podium dans la catégorie Sportsman. «On dit que ça prend de la chance pour gagner une course. C’est vrai. Cette fois-là, j’ai été très chanceux. Tout s’est bien passé pour moi, mais quand j’ai fini, j’avais mal aux épaules. Courser, c’est dur physiquement, on ne peut pas se l’imaginer. Avant, je ne m’en apercevais pas. Les p’tits gars sont très bons!»
Outre une excellente forme physique, un pilote doit savoir faire preuve de patience et de sang-froid lorsqu’il est en action sur la piste. «Il ne faut pas être nerveux. Ton cœur ne doit pas battre plus vite que quand tu t’assis dans ton char de rue! Si tu perds ton calme, tu ne performeras pas aussi bien.»
Inévitablement, René a transmis le goût du stock-car à ses fils. En plus d’assister aux prouesses de leur père en compagnie de leur mère Sylvia, Gino et Mario s’amusaient sur la piste familiale dès l’âge de deux ans. «Ils n’avaient pas les pattes assez longues pour peser sur le gaz, mais ils adoraient ça! Aujourd’hui, je suis très fier d’eux. Ce sont des compétiteurs très propres. Quand ils gagnent une course, ils ne l’ont pas volé.»
Au milieu des années 1980, René a offert l’un de ses bolides à Gino. C’était le début d’une belle aventure pour celui qui est vite devenu l’un des favoris de la foule. «C’était un vieux char avec un vieux moteur, mais c’était parfait pour commencer. J’ai connu des hauts et des bas, mais j’ai toujours eu le goût de continuer. Je suis un passionné de courses», témoigne Gino.
«La clé pour être compétitif, c’est d’abord de pouvoir compter sur de bons commanditaires, ce que j’ai la chance d’avoir depuis quelques années. Les coûts sont énormes. Certaines équipes peuvent avoir un budget de 150 000 $ par année. Pour nous, c’est parfois plus difficile rendu à la fin de la saison. On étire un peu la sauce avec nos pièces tandis que les équipes les plus fortunées s’en procurent de nouvelles», poursuit l’Edmondois de 50 ans.
Parfois, la rivalité entre les frangins Clair se fait sentir en piste. Cette saison, Mario occupe le 5e rang de la classe Modifiés à l’Autodrome Drummond tandis que Gino détient la 8e position. «C’est sûr que je ne veux pas qu’il me dépasse et lui non plus. Mais ça reste toujours propre», explique Gino.
Comme son frère aîné, Mario a fait ses débuts dans la classe Sportsman avant de faire le saut chez les Modifiés. Il dispute actuellement sa 25e saison. «L’adrénaline, la vitesse, le goût d’aller le plus vite possible : c’est ça qui me passionne dans la course. Et par-dessus tout, la victoire. C’est aussi une passion qu’on vit en famille. C’est plaisant de voir mon père continuer à son âge. Il fait ça pour le plaisir. Moi, je ne pense pas me rendre à 77 ans!», confie le spectaculaire pilote de 44 ans, qui exerce le métier de briqueteur.
En 2007, Mario Clair a écrit une page d’histoire pour un pilote québécois en remportant le championnat de la prestigieuse série américaine «Dirt 358-Modified». En 2013, il est aussi devenu le premier Québécois à monter sur le podium lors d’une finale de la série «Dirt Nationals» à Volusia, en Floride. «Je n’aurais jamais pensé atteindre ces sommets, mais sans commanditaires derrière moi, ce serait impossible. Pour avoir du succès, ça prend une bonne voiture, puis de la patience et de la pratique. On s’améliore avec nos erreurs. Aux États-Unis, j’ai coursé contre les meilleurs. C’est contre eux qu’on apprend. Et quand tu viens à bout de les battre, c’est le meilleur sentiment qui soit.»
Âgé de 14 ans, le fiston de Mario, Gorden, évolue dans déjà la série Revstar, qui regroupe la relève du stock-car québécois au volant de mini-bolides de type Slingshots. Le fils de Gino, Keven, âgé de 18 ans, devrait quant à lui faire ses débuts dès la saison prochaine. «Ils ont beaucoup de talent. Gorden est un pilote très calme. Il attend le bon moment pour attaquer. Avec sa récente victoire, chaque membre de la famille est donc monté sur le podium cette saison. S’il continue comme ça, on va s’embarquer dans les courses pour un autre 30 ans!», conclut Mario Clair en souriant.