Par Josyane Cloutier (redaction@journalexpress.ca)
CHRONIQUE. On a peur du changement. C’est normal, c’est humain. Pourtant, c’est quelque chose que j’ai de la difficulté à comprendre.
À mon sens, il y a deux sortes de changement : celui qu’on désire, et celui qu’on n’a pas vu venir.
Je commence cette chronique par le côté plus difficile.
Qu’on le veuille ou non, les choses vont changer.
C’est une fatalité, et l’un des aspects les plus tristement poétiques de l’existence humaine : rien de ce que vous avez présentement dans votre vie n’est là pour durer. Les relations, le travail, vous-mêmes. Tout.
Dur constat, n’est-ce pas?
Malheureusement (ou heureusement), l’impermanence est impossible à contrôler. Elle fait ce qu’elle veut. Elle n’a rien à cirer de vos états d’âme et de vos habitudes. Ce qu’elle aime, c’est vous regarder patiner après un imprévu en se faisant paisiblement une manucure.
Ce qu’on contrôle, toutefois, c’est notre attitude. Je crois beaucoup au pouvoir des mots, et dans un cas comme celui-ci, il est primordial. Se révolter contre un imprévu n’apporte rien à personne, alors pourquoi ne pas conserver cette énergie pour s’adapter au changement de façon plus positive?
Rien n’arrive pour rien. Même si cette phrase est un cliché qui me fait grincer des dents, elle est quand même appropriée dans ce contexte.
Et il y a le changement que l’on recherche, celui que l’on crée.
J’ai récemment pris de grosses décisions : j’ai quitté mon emploi à temps plein au journal pour partir en voyage à l’autre bout du monde, avant de retourner sur les bancs d’une école dont j’ignore pratiquement tout, dans une ville que je ne connais pas. C’est drastique et basé uniquement sur des hypothèses. Je trouve ça grisant.
D’ailleurs, la psychologue française Marie Andersen écrit ceci : «Nous avons souvent l’impression qu’il faut faire un grand saut dans le vide entre ce que nous “perdons” et ce que nous gagnerons. Alors que, dans la pratique, ce n’est jamais une falaise entre deux territoires; les événements s’entremêlent de façon complexe et inattendue.»
Je suis comme une enfant qu’on amènerait dans un nouveau parc. J’avais besoin de ça. C’est ma façon de combattre le temps qui passe : cette forme d’inconfort qui vient avec l’inconnu. Je préfère passer ma vie à découvrir plutôt que l’esprit endormi par la routine.
Je l’ai dit plusieurs fois dans mes chroniques précédentes, et je le répète : je n’ai pas la vérité absolue. C’est la façon que j’ai personnellement trouvé pour être heureuse, et je n’oblige personne à suivre ce modèle. Si la routine vous réussit, et bien je suis contente pour vous. Si ce n’est pas le cas, c’est là que la réflexion doit germer.
Cependant, je ne pense pas qu’il soit nécessaire de tout balancer au bout de nos bras pour profiter des bénéfices du changement. Les petits gestes sont aussi importants, ne serait-ce que changer de route pour aller au travail le matin, essayer un nouveau sport, ou simplement faire l’essai d’une nouvelle sorte de céréales à l’épicerie.
Je crois fermement à l’importance des petites choses, parce que je considère qu’elles peuvent être un premier pas vers de plus grands changements.
Un truc que j’utilise régulièrement (et qui mériterait probablement une chronique à lui seul) est la technique de la chaise berçante. Je m’imagine, très âgée, assise dans ma chaise berçante sur le bord d’un lac paisible, en train de savourer mes dernières années de vie. La Josyane de 90 ans commence alors à réfléchir à ses jeunes années, à ce qu’elle aurait souhaité faire davantage et à ce qu’elle aurait peut-être dû laisser tomber.
La majorité du temps, je constate que ce sont des décisions qui créent le plus de bouleversements dont la future Josyane est fière.
Changement rime souvent avec progression personnelle. On devient plus fort, et la capacité d’adaptation s’améliore. Les chances que l’impermanence vous regarde patiner d’un air goguenard s’amincissent, puisque rebondir devient plus facile.
C’est beau, le changement.
(NOTE DE LA RÉDACTION) Drummondvilloise signait à l’occasion une chronique baptisée «La Grano du bureau» dont l’objectif était de susciter une réflexion tant sur l’environnement que sur la vie en général. Mme Cloutier amorcera sous peu des études universitaires en géographie de l’environnement. Elle continuera de collaborer à l’occasion avec L’Express Week-end.